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Patrimoine

Démembrement de propriété

Sort de la créance de restitution du quasi-usufruit en cas de prédécès du nu-propriétaire

En présence d’un quasi-usufruit portant sur des sommes d’argent, la créance de restitution mise à la charge de l’usufruitier revient à la succession du nu-propriétaire en cas de prédécès de celui-ci avant l’usufruitier.

Lorsqu’un usufruit porte sur des comptes bancaires, l’usufruitier dispose, conformément à l’article 587 du code civil, du droit d’utiliser ces sommes mais à charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même quantité et qualité, soit leur valeur estimée à la date de la restitution. On parle de créance de restitution au profit du nu-propriétaire.

En principe, le décès de l’usufruitier qui met fin à son quasi-usufruit rend exigible la créance de restitution au profit du nu-propriétaire.

En l’espèce, il s’agissait de savoir quel sort réserver à la créance de restitution en cas de prédécès du nu-propriétaire avant l’usufruitier.

Les faits étaient les suivants.

À la suite du décès de son épouse en 1990, Monsieur devient usufruitier des comptes bancaires qui appartenaient en propres à celle-ci, leur fille unique en devenant nu-propriétaire, et ayant vocation à la pleine propriété de ces comptes au décès de son père. Mais la fille décède en 1997 laissant son époux et son père pour seuls héritiers. Puis le mari de celle-ci décède en 2002 laissant sa sœur héritière. Enfin, en 2020, le père décède laissant deux légataires universels.

Suite à l’extinction du quasi-usufruit, la succession de la fille nu-propriétaire réclame la créance de restitution mise à la charge des légataires universels de l'usufruitier, ce que ces derniers contestent.

Selon eux, on ne peut héritier que des biens présents dans le patrimoine du défunt au jour de son décès. Or, au décès de la fille nu-propriétaire, l’usufruit qu’exerçait son père n’ayant pas pris fin, ni l’usufruit, ni une créance de restitution à ce titre, n’étaient dès lors jamais entrés ni dans le patrimoine de la fille ni dans sa succession.

Déboutés en appel, les légataires se pourvoient en cassation.

La Cour de cassation rejette leur pourvoi.

En effet, dès avant le décès de son père, la fille, en sa qualité de nu-propriétaire, avait vocation à la pleine propriété des comptes bancaires alors même qu’elle n’en était pas encore titulaire et n’en avait pas la jouissance. Il en résulte qu’au décès de l’usufruitier, cet usufruit avait rejoint la nue-propriété échue entre temps à la succession de la fille. De sorte que les légataires universels du quasi-usufruitier étaient tenus de restituer à la succession de celle-ci la valeur des comptes bancaires.

Pour aller plus loin :

Voir « Donations - Successions », RF 2020-6 à paraître, § 4127

Cass. civ., 1re ch., 4 novembre 2020, n°19-14421

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