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Nouvelles règles de répartition des droits (participation et vote) en cas de démembrement de parts sociales

La loi de simplification du droit des sociétés garantit à l’usufruitier un droit absolu de participer aux décisions collectives dans les sociétés de personnes, SARL, SAS, et SA sans pour autant se prononcer sur la question de savoir si l’usufruitier a la qualité d’associé.

Rappel : règles de répartition du droit de vote avant le 21 juillet 2019

Lorsque le démembrement porte sur des droits sociaux, il convient de déterminer de façon précise qui, de l’usufruitier ou du nu-propriétaire, exerce le droit de vote. La solution va varier selon le type de sociétés.

Dans les sociétés par actions (type SA) :

Dans les sociétés par actions, le droit de vote attaché à l’action appartient à l’usufruitier dans les assemblées générales ordinaires (AGO) et au nu-propriétaire dans les assemblées générales extraordinaires (AGE) (c. com. art. L. 225-110, al. 1). Toutefois, les statuts peuvent prévoir une répartition différente (c. com. art. L. 225-110, al. 3).

La loi de simplification du droit des sociétés ne remet pas en cause les règles de répartition du droit de vote dans les SA.

Dans les sociétés de personnes, SARL et SAS :

Dans les sociétés de personnes (SNC, société en commandite simple, sociétés civiles) mais aussi dans les SARL ou les SAS lorsque les statuts sont muets sur ce point, le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier (c. civ. art. 188, al. 3 dans sa version en vigueur jusqu’au 20 juillet 2019).

Les statuts peuvent prévoir une répartition différente pour étendre ou restreindre les droits du nu-propriétaire ou de l’usufruitier (c. civ. art. 1844, al. 4).

Toutefois, la jurisprudence a posé 2 limites :

-l’usufruitier ne peut pas être écarté du droit de voter les décisions concernant l’affectation des bénéfices. Une telle clause porterait atteinte aux prérogatives essentielles attachées à l’usufruit définies à l’article 578 du code civil : celles d’user de la chose grevée d’usufruit et d’en percevoir les revenus (cass. com. 31 mars 2004, n°03-16694). En revanche, il a été jugé qu’une assemblée générale ayant pour objet des décisions collectives autres que l’affectation des bénéfices (la vente d’un immeuble) ne saurait être annulée au motif que l’usufruitier n’avait pas été convoqué pour y participer (cass. civ., 3e ch., 15 septembre 2016, n°15-15172) ;

-même s’il ne vote pas, le nu-propriétaire ne peut pas être privé de son droit de participer aux décisions collectives (cass. com. 4 janvier 1994, n°91-20256 ; cass. com. 21 janvier 2014, n°13-10151).

Nouvelles règles de répartition des droits de participer et de voter à compter du 21 juillet 2019

L’usufruitier a désormais un droit absolu de participer à toutes les décisions collectives dans toutes les sociétés :

À compter du 21 juillet 2019, tant le nu-propriétaire que l’usufruitier ont le droit de participer aux décisions collectives (c. civ. art. 1844, al. 3 nouveau).

Si cette disposition consacre la jurisprudence relative au droit de participation du nu-propriétaire, elle garantit un droit équivalent en faveur de l’usufruitier, sans qu’il soit nécessaire de l’inscrire dans les statuts.

Cette nouveauté met donc fin à la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle l’usufruitier n’a pas à être convoqué aux assemblées qui ne statueraient pas sur l’affectation des bénéfices (cass. civ., 3e. ch, 15 septembre 2016, n°15-15172, précité).

Les statuts ne peuvent pas déroger au droit absolu du nu-propriétaire et de l’usufruitier de participer aux décisions collectives (c. civ. art. 1844, al. 4 nouveau).

Ce droit de participer aux décisions collectives d’une assemblée générale s'applique à l'ensemble des sociétés, y compris les SA.

Ce droit de participer est distinct du droit de voter.

→ATTENTION

La loi ne se prononce pas sur la qualité d’associé de l’usufruitier, question très discutée en doctrine. La jurisprudence a reconnu, en revanche, la qualité d’associé au nu-propriétaire (cass. civ. 5 juin 1973, n°72-13634).

L’usufruitier conserve le droit de vote concernant l’affectation des bénéfices dans les sociétés de personnes, SARL, SAS :

Comme avant le 21 juillet 2019, le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier (c. civ. art. 1844, al. 3 nouveau). Toutefois, les statuts peuvent déroger à cette répartition (c. civ. art. 1844, al. 4 nouveau).

Pour les décisions autres que l’affectation des bénéfices, l’usufruitier peut représenter le nu-propriétaire par convention extra-statutaire dans les sociétés de personnes, SARL, SAS :

À compter du 21 juillet 2019, pour les décisions autres que celles qui concernent l’affectation des bénéfices, le nu-propriétaire peut déléguer, par convention extra-statutaire, l’exercice de son droit de vote à l’usufruitier (c. civ. art. 1844, al. 3 nouveau).

Dans ce cas, les statuts ne peuvent pas limiter ou interdire la décision prise entre le nu-propriétaire et l’usufruitier (c. civ. art. 1844, al. 4 nouveau).

Loi 2019-744 du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés, art. 3, JO du 20

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